Face aux difficultés économiques auxquelles sont confrontés les pays pauvres, le recours à des investissements directs étrangers et à l’appui budgétaire des partenaires techniques et financiers est souvent recherché.
Afin de réunir tous ces partenaires en un même lieu et leur faire prendre des engagements, certains pays recourent sous l’égide de la Banque Mondiale, souvent chef de file des partenaires financiers, à ce que les praticiens de la finance nomment TABLE RONDE DES BAILLEURS AU CONFERENCE DES PARTENAIRES.
Ces rencontres de haut niveau, au delà de toute la communication et des moyens financiers importants investis dans leur organisation, laissent parfois place à des interrogations lorsqu’on les a vecues de l’intérieur.
Je propose ici une opinion fondée sur l’expérience vécue lors de ces grandes rerouvailles internationales à Paris, organiséees par deux pays voisins, le Bénin et le Burkina Faso.
La Table Ronde des bailleurs de fonds du BENIN , s’est tenue du 17 au 19 Juin 2014 à la représentation de la Banque Mondiale à Paris.
Conduite par le Président de la République lui même, le président Yayi Boni, l’objectif recherché était d’obtenir le soutien des partenaires techniques et financiers à savoir la Banque Mondiale comme chef de file de bailleurs de fonds, la Société Financière Internationale, la Banque Islamique de Développement, la Banque Africaine de Développement, la Banque Ouest Africaine de Développement…… ; en vue afin d’obtenir leur soutien à financer la stratégie de la croissance et de la réduction de la pauvreté 2011-2015 du Bénin.
Rappelons que le taux de croissance du Bénin s’est établi à 3,5% en 2011, à 5,4% en 2012, à 5,6% en 2013 contre 2,6% en 2010.
Dans le cas du Bénin en 2014, sur 2900 milliards de fcfa recherchés, des intentions obtenues des partenaires techniques et financiers se sont établies à 5600 milliards de fcfa, soit près de 200 % des montants espérés.
Quant à la conférence des partenaires du Burkina Faso tenue du 7 au 8 décembre 2016 à Paris, les partenaires techniques et financiers avec la Banque Mondiale comme chef de file se sont réunis dans un hôtel du 17 eme arrondissement sur invitation du gouvernement Burkinabé avec à sa tête Monsieur Rock Marc Christian Kabore, son président.
L’objectif du gouvernement burkinabé était de solliciter l’appui et l’engagement de ses partenaires en vue de financer le PROGRAMME NATIONAL DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ET SOCIAL ( PNDES ) du BURKINA FASO, programme évalué à 15395 milliards de francs FCFA soit à peu près 23,4 milliards en euros.
Le gouvernement du Premier Ministre burkinabé Mr Paul Kaba Thiéba s’est proposé de financer ce programme à hauteur de 63,4% afin de prouver sa détermination à venir à bout de l’état de pauvreté et de sous équipement de son pays.
Selon les autorités gouvernementales, la réalisation de ce programme ferait passer la croissance déjà confortable du pays d’un taux de 5,7% en 2016 à 7,7% en moyenne d’ici 2020.
Au terme de la première journée de travail, les annonces et intentions d’engagements des PARTENAIRES Techniques ET Financiers DU BurkinaFaso sur le PNDES 2016-2020 étaient estimées à près de 8000 milliards de Fcfa.
Quant à la deuxième journée consacrée aux investisseurs, ces derniers ont affiché leur volonté d’accompagner le PNDES en avançant des intentions d’investissements de plus de 10 000 milliards de FCFA soit au total plus de 18 000 milliards d’intentions de financement recueillies correspondant à plus de 300% des montants recherchés.
Ayant suivi de bout en bout cette Table Ronde du Burkina faso et celle du Bénin il y a deux ans, j’en viens à la conclusion que ces grandes messes sont plus une opération de marketing communication qui vise à s’offrir une plateforme internationale pour présenter sa vison, sa stratégie et obtenir l’appui des partenaires divers.
Les intentions formulées par les bailleurs ne sont en rien des engagements, loin de là.Quand on analyse de près la facilité avec laquelle les différentes institutions prononcent leurs intentions de financement, ça laisse un goût d’inachevé. Les institutions financières se faisant la concurrence pour mieux se positionner auprès des gouvernements et des autres institutions, ne prennent généralement aucun risque à annoncer des intentions de financement.
A leur décharge, on retiendra que dans les promesses faites par les INSTITUTIONS FINANCIERES, il y a souvent de nombreuses conditionnalités qui doivent aboutir à la mobilisation des fonds par les gouvernements, sans oublier que ces derniers aussi ont dans leurs bases des intentions de projets et non de vrais projets avec des études existantes et finalisées. La conduite même des études peut conduire à des projets infructueux ou non viables économiquement.
Les propositions ne portent pas non plus sur les taux d’intérêts et autres conditionnalités posées par les bailleurs.
Il est aussi à noter que certains montants avancés ne sont que des rappels et revues de programmes préexistants.
Quant aux investisseurs privés, leurs intentions de financement sont à mon avis, purement illusoires, si ce n’est parfois fantaisistes.
Chaque investisseur à la recherche de marchés publics ou d’intérêt économique annonce souvent des intentions d’investissements sans une prise en compte réelle de l’environnement économique, du besoin restant à satisfaire et des capacités réelles du pays. On en vient à additionner des intentions qui ne sont en accord ni avec les capacités réelles de consommation de crédit du pays, ni avec son niveau d’endettement.
Dans le cas du Burkina Faso par exemple, on retiendra que les besoins ont été souscrits à plus que 300 %.
Tout ceci est décorrelé des capacités d’endettement du pays car faut il le rappeler, il s’agit souvent de DETTES et non de dons comme le pense le grand public.
En résumé, ces types de conférences ont le mérite de focaliser en un temps réduit sur les potentialités et besoin d’un pays ; d’associer les partenaires techniques et financiers à la réalisation d’un programme de gouvernement dans un lieu qui les mets en observation et leur permet de discuter de façon rapprochée avec les membres du gouvernement et ceci, sans délais.
Pour les investisseurs privés, c’est une très belle occasion de rencontrer les membres du gouvernement et d’autres décideurs qu’ils ont parfois du mal à faire réagir efficacement sur certains dossiers.
J’en concluerai que les Tables Rondes de ce type sont utiles lorsque le coût de leur organisation n’est pas prohibitif. Au niveau des intentions de financement, il y a de la marge de progression à réaliser pour mieux les formaliser dans un cadre mieux organisé.
Maxime Dossa
Consultant financier